Jean Faivre
« Rien n’est plus fort qu’une idée dont l’heure est venue ». Victor Hugo
Il en est ainsi de la démocratie participative.
Toutefois, son utilisation immodérée fait apparaître certains risques dont l’existence est rarement soulignée.
Primo, l’objet de la démocratie participative est de remédier aux insuffisances de la démocratie représentative. A ce stade, il convient de rappeler que la démocratie représentative désigne un système politique dans lequel le pouvoir politique est exercé, au nom du peuple, par des représentants élus. Le constat d’un divorce croissant entre les gouvernants et les gouvernés n’est pas neuf. Divers instruments pourraient permettre d’y porter remède. Toutefois, le recours massif à des mécanismes de démocratie participative peut contribuer à creuser le fossé entre citoyens actifs, dont l’intérêt et l’implication dans la chose publique sont naturels, et les citoyens qui, pour différentes raisons, manifestent peu d’intérêt pour la vie de la cité.
Secundo, consulter les citoyens fait inévitablement naître des attentes dont l’absence de prise en compte par les pouvoirs publics ne manquera pas de générer des passions tristes et de la colère qui pourront éventuellement se retourner contre la démocratie. Deux ans après la consultation organisée par la CeA sur la sortie de l’Alsace du Grand Est, a-t-on assisté au commencement d’un début de frémissement annonçant un changement institutionnel ?
Tertio, au lien de resserrer les liens entre citoyens et institutions, au lieu de rendre leur fonctionnement plus intelligible, au lieu de contribuer à la compréhension des règles sur la répartition des compétences entre collectivités, entre l’Etat et les collectivités et entre les communes et les intercommunalités, la consultation imprudente et frénétique des citoyens sur des sujets excédant largement les attributions de l’autorité organisatrice de la consultation renforce le flou entourant les domaines d’intervention de chaque institution.
Si l’implication des citoyens dans le fonctionnement démocratique est vitale, qu’il est urgent de réconcilier gouvernants et gouvernés, il est tout aussi urgent que les responsables politiques, démocratiquement élus, assument la nécessité de l’autorité qu’implique l’exercice de leur mission, en traduisant en actes le programme politique sur la base duquel ils ont été élus, sans user d’une dérobade commode telle que la démocratie participative qui permet de repousser aux calendes grecques la réalisation de certains projets largement plébiscités.
